DesCodeuses, pour motiver les filles à se lancer dans le numérique !
Pourquoi si peu de filles dans les métiers du numérique ? Souad Boutegrabet, fondatrice de l’association DesCodeuses, nous explique comment faire bouger les choses.
Ce 8 mars, à l’occasion de la journée des droits des femmes, nous avons décidé de mettre en ligne l’interview que nous avons initialement publiée dans le cahier des parents du n°6 de notre magazine Geek Junior.
Présentation des DesCodeuses
Casser les codes avec le code, voilà l’ambition de Souad Boutegrabet. Fondatrice de DesCodeuses, Software Engineer, elle a implanté son école dans le quartier Belleville-Amandiers, dans le 20e arrondissement de Paris, un quartier populaire où « 49 % des femmes sont en recherche d’emploi », mais où seulement 8 % se tournent vers les opportunités numériques. Un grand écart qui pousse Souad Boutegrabet à vouloir favoriser l’accès des femmes des quartiers, décrocheuses scolaires ou en reconversion professionnelle, aux métiers du web. L’association DesCodeuses a créé un programme complet pour les femmes. Le programme « Tech the Power » : elle part à leur rencontre, leur présente les différentes opportunités professionnelles liées au numérique et organise des ateliers d’initiation et des formations courtes qui permettent de mesurer l’autonomie numérique de chacune. L’association s’est vu décerner le trophée de l’économie sociale et solidaire par la Ville de Paris en 2019.
L’interview de Souad Boutegrabet
Pourquoi avoir créé l’association Descodeuses ?
En France, les femmes restent peu attirées par les métiers de la high-tech. Les résultats de la dernière étude Gender Scan viennent confirmer cette tendance. C’est dans le numérique que l’évolution est la plus préoccupante, tant sur le plan des diplômes obtenus que sur l’accès à l’emploi. Entre 2013 et 2017, le nombre de femmes françaises diplômées du numérique a chuté de 2 %, alors qu’il progressait au même moment de 23 % en Europe. Une régression ! Notre collectif de femmes et d’hommes a voulu montrer que cet environnement très masculin pouvait se féminiser. Nous avons commencé par des ateliers d’initiation à la programmation dans des quartiers prioritaires définis par la politique de la Ville, là où les revenus sont les plus faibles et où l’on observe un niveau de décrochage scolaire qui peut dépasser 40 %.
Quels sont les profils des femmes qui participent à vos ateliers et à vos formations ?
Très peu d’elles ont fait des études supérieures. Sans bac, elles sont parfois devenues mamans et n’avaient pas de projet professionnel abouti. Nous avons aussi des jeunes filles qui sont sorties du milieu scolaire. Avec Descodeuses, en partenariat avec INCO Academy, nous proposons une série d’ateliers pratiques, un bootcamp qui dure un mois pour découvrir 4 métiers techniques : programmation, SEO, design et marketing digital.
L’épidémie de la Covid-19 a-t-elle bouleversé l’organisation de vos ateliers ?
Avec l’épidémie, des femmes ont abandonné pour notamment gérer les enfants. On a créé alors des parcours sous la forme de bootcamp en ligne avec des projets collectifs. Et cela marche bien. Sur 50 participantes, 23 ont ensuite repris une formation.
Quels conseils pourriez-vous donner aux parents qui se posent des questions sur l’avenir de leurs enfants, notamment de leurs filles qui voudraient se lancer dans des métiers du secteur numérique ?
On reçoit pas mal de parents qui se posent cette question. Commencer par un atelier découverte, par le « faire », c’est un bon moyen. Voici un exemple. Beaucoup de jeunes filles se passionnent pour les réseaux sociaux, alors nous partons de leur passion pour développer leurs compétences techniques et les amener à développer un esprit critique. Qu’est-ce qu’elles aiment/n’aiment pas sur les réseaux et que feraient-elles pour changer les choses, et comment ? L’objectif est de les orienter vers un métier très demandé et valorisé, comme celui de Community Manager. Il faut également leur montrer des modèles de femmes qui ont réussi dans ce secteur. On leur explique que les compétences acquises à la suite de nos ateliers ont de la valeur sur le marché du travail, avec des salaires bien supérieurs à ceux qu’elles pourraient espérer sans qualification.
Et pour quels résultats ?
Depuis 2018, 1000 femmes ont été initiées à la programmation et chaque année, deux promos de femmes sont formées par DesCodeuses, comprenant un stage en milieu professionnel. Elles acquièrent un socle de compétences techniques leur permettant de devenir, à terme, développeuses web. Elles savent construire des solutions techniques sur-mesure. 80 % ont pu décrocher leur premier job de développeuse junior, pour certaines, dans de grands groupes qui veulent féminiser leurs équipes informatiques.
Site web : descodeuses.org